Voyager sans bouger.
Un aperçu de Rome incomplet et subjectif, par un « ciné-spectateur-touriste » !

Nous y voilà : « Vacances romaines »1, avec le forum en arrière-plan du générique de ce film américain, nous précise bien que tout a été filmé et enregistré à Rome ! Mais que choisir ? Des milliers de films ont été tournés à Rome, éternelle « ville éternelle ». Des milliers d’endroits à découvrir ou à revoir. Alors, par où commencer ?

La première image de Rome, dans le film de 1987 de Peter Greenaway, « Le ventre de l’architecte »2, montre la Piazza del Popolo et ses deux églises jumelles, Santa Maria dei Miracoli et Santa Maria in Montesano, construites en 1679 et 1681. La Via del Corso, au centre, renforce la symétrie parfaite de l’ensemble. Un regard attentif constate d’ailleurs que les deux bâtiments se ressemblent dans leurs volumes et leurs apparences, mais se différencient par de nombreux détails, caractéristiques du style baroque.

De manière similaire, le court métrage « Rome »3,qui donne un aperçu de la ville en 9 minutes, dans la série « 12 registi per 12 citta » de 1989, commence avec exactement le même point de vue. Il est peu probable que le réalisateur Antonioni, le « maître », se soit inspiré du film de Greenaway. Il faut croire que ce choix s’impose par sa force cinégénique, représentatif de la grandeur et de l’importance de la ville.

Dans un tout autre film, quand River Phoenix se réveille un matin à Rome, la première chose qu’il aperçoit dans « My own private Idaho »4 est encore les deux mêmes églises jumelles. Et perdu dans sa veste rouge, il est visiblement très impressionné. Si Greenaway, Antonioni et Van Sant commencent l’exploration de la ville à cet endroit, c’est sûrement un bon départ pour notre petite promenade !
Continuons la visite en évitant la Via del Corso qui longe les deux églises, et passons à gauche sur la Via del Babuino, jusqu’au très célèbre escalier…


… qui monte de la Piazza di Spagna jusqu’à l’église de la Trinité-des-Monts. Construits entre 1723 et 1725 par Francesco de Sanctis, l’escalier et la place constituent un des endroits les plus beaux de la ville. Toujours remplis de touristes, on pourrait y surprendre Audrey Hepburn et Gregory Peck1 en train de flirter autour d’une glace…

Ou John Saxon et Letitia Roman, « La fille qui en savait trop »5, dans la même attitude, filmés avec le même cadrage, qui accentue la montée et la silhouette imposante de l’église.


L’endroit change complètement d’ambiance la nuit pour devenir angoissant et fantasmagorique, quand Letitia Roman5 y est agressée par un inconnu et devient par la suite témoin d’un meurtre, toujours sur le parvis de l’église de la Trinité-des-Monts.


Mario Bava inaugure avec cette séquence magistrale le giallo, genre italien qui mélange film policier, horreur et érotisme, avec une prédominance de décors baroques et délirants.
Pour se remettre de nos émotions, prenons un peu de recul pour mieux apprécier la prochaine étape :

Depuis la Piazza di Spagna, on tourne à droite dans la Via Borgogna, puis à gauche dans la Via del Corso et on arrive au monument à Victor-Emmanuel II, communément appelé « la machine à écrire ». C’est ici que commence l’aventure italienne de l’agent secret britannique John Drake (Patrick McGoohan), dans la série « Destination Danger 6 ».

« La machine à écrire », décriée par la démesure de ses proportions et qui a nécessité, entre 1881 et 1911, la destruction d’une bonne partie du quartier moyenâgeux existant, se détache bien du panorama de Rome. Elle est aussi dans la ligne de mire de l’« establishing shot » de SPECTRE7, dans lequel un autre agent secret britannique, …


… un peu plus célèbre que John Drake, arpente nonchalamment les rues de Rome à bord de son Aston Martin DB 10.

Voici une autre vue de l’imposant monument à Victor-Emmanuel II en marbre blanc, de face et dans l’axe de la Via del Corso, où on se fait doubler par la Vespa de Gregory Peck et Audrey Hepburn1, qui font le tour de la ville. Ça ne serait pas étonnant de les retrouver plus tard !

C’est dans ce monument, construit par Giuseppe Sacconi, que se déroule l’exposition consacrée à l’architecte français Etienne-Louis Boullée, organisée par l’américain Stourley Kracklite (Brian Dennehy), dans « Le ventre de l’architecte » 2.


Contournons ensuite le bâtiment par la droite, pour suivre Suzanne Pleshette dans « Amours à l’italienne »8, qui descend les escaliers pour en remonter d’autres jusqu’à …

… la place du Capitole, une des plus belles places de Rome également, de forme ovoïde, dessinée par Michel-Ange et surmontée d’une statue équestre représentant l’empereur Marc Aurèle.


Si leurs visites respectives de Rome n’avaient pas été espacées de 25 ans, c’est ici que Suzanne8 aurait pu retrouver l’architecte Stourley Kracklite (Brian Dennehy)2, pour admirer ensemble les vestiges impressionnants et surdimensionnés de la Rome antique.
Dirigeons-nous à gauche dans la Via di San Pietro in Carcere, puis à droite dans la Via dei Fiori Imperiali jusqu’au Colisée :

C’est à côté du célèbre amphithéâtre que l’infatigable agent secret français OSS 1179, enquête dans une ambiance bleutée un peu irréelle, évoquant les « nuits américaines » – un procédé des années 50/60 pour filmer le jour et obtenir une ambiance nocturne, plus ou moins réaliste.

On retrouve encore l’Aston Martin de l’agent 0077 qui arrive à toute allure de l’autre côté du monument. Décidément, Rome n’est pas seulement une destination pour des vacances et des sorties romantiques, mais aussi un véritable nid d’espions !

Sans surprise, on croise à nouveau la Vespa de Gregory Peck sur laquelle se promène toujours la sublime Audrey Hepburn1.
L’intérieur du Colisée a été le lieu de beaucoup d’affrontements, …


… comme l’explique si bien John Saxon à Letitia Roman5. Celui-ci décrit sans doute, avec moult gestes, le combat final entre Joaquin Phoenix (le frère de River, que nous avons croisé sur la Piazza del Popolo tout à l’heure) et Russell Crowe dans « Gladiator » (2000) de Ridley Scott. Ou bien l’affrontement entre Bruce Lee et Chuck Norris, qui fut tourné ici en 1972 dans le ridicule, mais cultissime « Fureur du dragon ».

On retient surtout l’apparition d’Ursula Andres au pied du Colisée, très déterminée à éliminer sa « Dixième Victime »10, avec une mise à mort très pop, digne des années soixante.




(prochainement un deuxième tour à Rome en compagnie de Federico Fellini et de Dino Risi)
1 ROMAN HOLIDAY (Vacances romaines) 1954 William Wyler
2 THE BELLY OF AN ARCHITECT (Le ventre d’un architecte) 1987 Peter Greenaway
3 ROME – 12 REGISTI PER 12 CITTA 1989 Michelangelo Antonioni
4 MY OWN PRIVATE IDAHO 1991 Gus van Sant
5 LA RAGAZZA CHE SAPEVA TROPPO (La fille qui en savait trop) 1965 Mario Bava
6 DANGER MAN ép. 1 – A VIEW FROM THE VILLA (Déstination Danger) 1960 Terry Bishop
7 SPECTRE 2015 Sam Mendes
8 ROME ADVENTURE (Amours à l’italienne) 1962 Delmer Daves
9 OSS 117 – CAIRO, NID D’ESPIONS 2006 Michel Hazanavicius
10 LA DECCIMA VITTIMA (Le dixième victime) 1965 Elio Petri