éloge de l’”Establishing shot”

Dans le cinéma classique, la « scène d’ouverture » (establishing shot) permet d’expliquer au spectateur en un seul plan large où se situe l’intrigue : dans le désert, à la campagne, à la plage, ou le plus souvent en ville.
Comme ci-dessus, cette vue du centre de New York en plein effervescence, fige l’instant où l’extraterrestre Klaatu décide que ça sera « Le jour où la terre s’arrêta » (film réalisé par Robert Wise en 1951).

Pour être certain que le spectateur comprenne bien le message et reconnaisse le lieu, le nom de la ville où se situe l’action est souvent inscrit en lettres capitales au début du film. Comme ici, l’expédition de plongeurs partira de Kingston, berceau du reggae, à la recherche d’une mystérieuse cargaison, « La Cité sous la mer » (film réalisé par Budd Boetticher en 1953).

En plus de situer l’intrigue géographiquement (ci-dessus pour « Godzilla vs Destroyah »), ces vues acquièrent donc une allure de carte postale : une invitation à voyager, un rappel des expéditions déjà réalisées.

Pour le grand retour d’Alfred Hitchcock en 1972 dans sa ville natale, après des décennies d’activité à Hollywood, la scène d’ouverture de « Frenzy » reproduit une véritable carte postale avec nom et blason de la ville.

Ce long travelling aérien se poursuit jusqu’à cadrer en plan large l’emblématique Tower Bridge, « hot spot » touristique de la ville.

Cette introduction majestueuse de Londres le long de la Tamise se termine – shocking ! – avec un cadavre qui flotte dans l’eau. Après tout, nous sommes dans un film d’Alfred Hitchcock !

« 36 heures avant le débarquement » introduit également une ville européenne, Lisbonne, par une véritable carte postale (pas si vraie que ça puisque le directeur artistique américain a fait une erreur d’orthographe : « Sudacoes » au lieu de « Saudacoes »).

La vue somptueuse depuis le sommet du parc Eduardo VII renforce le contraste entre décor idyllique (visible) et activités sombres et brutales (cachées) des espions qui contaminent la ville.
(merci à http://lisboacinema.blogspot.com pour les deux dernières images)
THE DAY THE EARTH STOOD STILL (Le jour où la terre s’arrêta) 1951 Robert Wise
CITY BENEATH THE SEA (La cité sous la mer) 1953 Budd Boetticher
GODZILLA vs DESTROYAH 1995 (Takao Okawara)
FRENZY 1972 Alfred Hitchcock
36 HOURS (36 heures avant le débarquement) 1965 George Seaton
3 réflexions sur “Une carte postale pour le spectateur”